The Thing

The Thing de Matthijs van Heijningen Jr.

Dix ans après avoir dirigé le très moyen Ghosts of Mars, Môssieur Carpenter avait fait son "grand" retour dans les salles obscures, il y a quelques mois, avec The Ward. Ce qui semblait être un évènement ne l'est visiblement pas tant que ça puisque le film n'a pas encore trouvé sa distribution en France. Un Carpenter moisissant dans un placard, c'est mauvais signe. C'est donc un cinéaste pas vraiment connu au nom imprononcable qui va tenter de remettre au goût du jour un film relativement culte, The Thing. La version 2011 de The Thing est... enfin, a été annoncée comme un préquel (à savoir une œuvre réalisée après une œuvre donnée, mais dont l'action se déroule avant du point de vue de l'univers de fiction) au film culte de Carpenter sorti en 1982. De façon générale, je ne comprends pas vraiment l'utilité d'un prequel, si ce n'est pour faire de l'argent. L'histoire arrive parfois à répondre à quelques questions laissées en suspend sur le précédent film, mais on a souvent l'impression que... qu'on s'en branle en fait. Et The Thing fait parti de ces prequels-là.

Alors, il faut admettre que Heijningen a fait du bon travail, on retrouve l'ambiance glaçiale de 82, on trouve également beaucoup de similitude dans les décors, dans les personnages, dans la chose, bref, on sent que la reconstitution a été travaillée. Peut-être trop mais on y reviendra. La réalisation est aussi relativement correcte, en témoigne les quelques plans sublimes de ce désert blanc. Notons également que le directeur photo a su donner à l'image un style qui s'approche également de la version de Carpenter, avec une image un peu désaturée, un petit grain de pellicule... un truc un peu old-school quoi, et c'est plutôt agréable - bon, étrangement tout ça disparait pendant quelques séquences, allez savoir pourquoi. Concernant le film en lui-même, il est relativement crédible. Sans aller chercher des procédés très originaux, ou sans avoir la gestion de l'espace de son mentor, Heijningen arrive à rendre son film suffisamment immersif pour qu'on veuille bien le prendre comme un oeuvre à part entière. Le problème, c'est que ça n'en est pas une.

Car si tout ce travail est crédible, c'est parce qu'il ressemble à un copier/coller de son prédécesseur. Voyez par vous-même, on retrouve cette chose, on retrouve l'infection, la paranoïa entre les personnages, le lance-flammes, la glace, la neige, même la contruction du récit semble être décalquée sur le premier film. Au final, seule la dernière séquence (pendant le générique) nous permet vraiment de confirmer que c'est un prequel. Mais un prequel sans originalité, qui se contente de copier son frère sans réellement apporter quelque chose de nouveau (enfin, d'intéressant disons), ne serait-ce pas plutôt un remake mon cher ?

Eh bien oui, The Thing est tout bêtement un remake du film de Carpenter. Car si John avait laissé des zones d'ombres dans son film, c'est certainement parce qu'il a jugé que ça rendrait son propos plus fort, et on ne le contredira pas. Alors voir Heijningen tenter de combler ces trous, parfois de façon ridicule, c'est un peu décevant. Que penser de la scène de prise de sang dans le film de Carpenter, scène culte qui ici se transforme en recherche de plombages... Mais sans entrer dans les détails, c'est vraiment l'introspection des personnages qui manque au film de Heijningen, cette confiance des autres qui s'efface à chaque minute, cette paranoïa, cette méfiance, cette espèce de solitude, bref, tout ces éléments mis en scène de main de maitre par Carpenter dans son film ont ici, quasiment disparus. Enfin non, ils n'ont pas disparus, ils sont justes mal utilisés. Et si la mise en scène y est pour quelque chose, il faut admettre que les acteurs ont aussi leur part de responsabilité. Qu'on foute des vikings dans le casting je veux bien, mais de là à croire que la belle Mary Elizabeth Winstead puisse endosser le costume de l'indétrônable Kurt Russell, c'est autre chose. Sans oublier que le film est "officiellement" un prequel, je le rappelle, alors si au bout de cinq minutes on nous montre un chien qui ressemble comme deux gouttes d'eau à celui qu'on retrouvera chez Carpenter, ça casse un peu le délire, non ?

Et cette fameuse chose, parlons-en puisque c'est la star du film. Là encore, ils ont gardés la même idée (ce qui, évidemment, est tout à fait normal), et le design des créatures est loin d'être honteux. Malheureusement, j'aime bien la vieille école, alors on ne remplace pas les animatroniques de 82, c'est pêché. Non pas que les effets visuels soit moches, quoiqu'on a parfois l'impression de voir du Paul WS Anderson, mais quand on voit ce qu'à fait Carpenter à l'époque, ou même ce qu'à fait Ridley Scott avec son costume latex pour Alien, on se demande encore comment on peut s'acharner pendant des heures à créer un rendu numérique suffisamment réaliste alors qu'on fait des miracles avec nos petites mains d'artisants - ah, oui, l'argent.

En Bref, la version 2011 de The Thing n'est pas horrible, elle est relativement correcte si on l'a prend comme une oeuvre à part entière. Malheureusement, si le film est un remake plus qu'un prequel, il n'innove pas, n'offre rien de très intéressant, et se contente gaiement de reproduire ce qu'à fait Carpenter il y a une trentaine d'années.